Après la Grande Démission, où un million de salariés français ont quitté leur emploi en seulement six mois, un nouveau phénomène discret est en train d’émerger : le quiet quitting. Il se traduit en bon français par “démission silencieuse”. Apparu sur Tik Tok, l’une des plateformes préférées de la génération Z, ce phénomène tire ses origines de la pandémie et de la généralisation du travail hybride. Il reflète une déconnexion profonde entre les attentes de l’employeur et de l’employé. Est-il encore temps d’éviter la vague du Quiet quitting ? Comment prévenir ce type de désengagement ? La bonne nouvelle, c’est que vous pouvez freiner cette tendance et agir.
“Je ne me tuerai point… à la tâche” ! Qu’est-ce que le Quiet Quitting ?
Les salariés Quiet Quitters, spécialement Gen Z et Gen Y, ne veulent plus faire des pieds et des mains au travail et se sacrifier à la tâche dans l’espoir d’une promotion ou d’une augmentation. Ils refusent de faire des heures supplémentaires et de s’impliquer à 200 %. Adieu culte de la performance et “le travail, c’est la vie”. Bonjour le minimum syndical ! Le travail n’est plus au centre des préoccupations. Ce phénomène est une façon pour l’employé de gérer l’épuisement professionnel pour atténuer le stress et d’avoir une certaine paix mentale. Sur TikTok, certains salariés sont passés maîtres dans “l’art de ne rien faire” en développant des stratagèmes pour en faire le moins possible. Christophe Nguyen, psychologue du travail et président du cabinet Empreinte humaine, explique dans la revue Le Point que “le quiet quitting est une sorte de désengagement au travail, que l'on peut qualifier de néo-présentéisme. Il consiste souvent à avoir une posture de retrait, liée à une déception professionnelle.»
Quiet quitting : comment l’éviter avant qu’il ne soit trop tard ?
Savoir reconnaître les signes du Quiet Quitting
La meilleure façon d’agir contre ce phénomène consiste à savoir reconnaître les signes avant-coureurs d’une démission silencieuse. Les signes d’un salarié qui opte pour une stratégie de Quiet Quitting peuvent prendre différentes formes selon les raisons de désengagement. Si un employé est mécontent de son entreprise, les signes seront beaucoup plus visibles qu’une personne qui a pour objectif de vouloir un meilleur équilibre vie personnelle - vie professionnelle. Voici quelques,signes, non-exhaustifs, d’un salarié en Quiet Quitting :
- Arriver en retard ou partir plus tôt
- Ne pas assister aux réunions ou assister aux réunions sans parler
- Réduction de la productivité
- Moins de contribution aux projets d’équipe
- Manque d’enthousiasme
- Isolement des autres membres de l’équipe
- Retrait de toute conversation, activité ou tâche non-nécessaire
Se recentrer sur la reconnaissance
Seulement 6 % des salariés français sont engagés au travail contre 21 % dans le monde (étude du cabinet de conseil Gallup). L'une des principales raisons pour lesquelles les employés se désengagent est qu'ils ne sentent pas que leurs efforts sont appréciés. Ils ont du mal à reconnaître la valeur et le but de leur travail.
La reconnaissance au travail ne semble pas être une priorité stratégique pour 85 % des chefs d’entreprise (études d'O'Boyle). Pourtant, lorsque les entreprises vont au-delà de leurs attentes, les employés sont susceptibles de rester engagés. Une bonne reconnaissance au travail passe non seulement par une rémunération à la hauteur de leurs attentes, mais aussi passe par la prise en compte de leur bien-être. Une bonne reconnaissance au travail évite également l'épuisement professionnel.
Avoir de vrais leviers de motivation
Les avantages salariés ont toujours eu la cote dans l’implication et la motivation des collaborateurs. Mais les attentes des salariés ont considérablement évolué depuis la crise sanitaire. « Pendant la crise sanitaire, de nouvelles manières de travailler ont vu le jour, intégrant davantage de souplesse et d’autonomie” explique Thierry Rochefort, professeur associé à l’Institut d’administration des entreprises (IAE) de Lyon dans un article le Monde.
La machine à café, la table de ping-pong ou les tickets de cinéma - jadis rois des avantages salariaux - ne suffisent plus à réengager les salariés démissionnaires silencieux. Plus de 70 % des employés ne sont pas satisfaits des avantages proposés !
Le travail hybride a ouvert un champ de nouveautés en matière d’avantages aux employés. Parmi eux, les avantages dits “non-salariaux” se multiplient pour favoriser un meilleur équilibre entre la vie privée et la vie professionnelle. Télétravail, semaine de quatre jours, congés sabbatiques, congés illimités… De nombreuses entreprises veulent séduire les employés et attirer les talents en proposant des avantages attractifs.
Certes, le télétravail reste l’avantage préféré des salariés français selon une étude de la CGT. Mais d’autres avantages ont vu le jour pour s’adapter à la flexibilité du télétravail. Par exemple, la salle de sport à côté du bureau est remplacée par un abonnement de sport à la carte permettant aux salariés une liberté dans leur pratique sportive, qu’ils soient au bureau, chez eux ou en télétravail. L’accompagnement psychologique à travers des services dédiés aux salariés émerge aussi parmi les nouveaux avantages salariaux. L’entreprise a un rôle clé pour veiller au bien-être au travail de ses employés qui ne veulent plus s’épuiser à la tâche.
Pour résumer, opter pour des avantages qui permettent de mieux concilier la vie privée et la vie professionnelle est une des clés pour réengager vos salariés démissionnaires silencieux.
Entretenir la flamme au travail
Comme en amour, une relation de travail, ça s’entretient. Les salariés ne quittent pas - même discrètement - leur entreprise. Ils quittent leur employeur. C’est pourquoi il est important pour les employeurs de raviver la flamme qui s’est éteinte. Entendez par là : redonner du sens au travail. En décembre 2021, 92 % des salariés se déclaraient en quête de sens. Pourquoi consacrer l’intégralité de son engagement envers une entreprise, alors qu’il y a des associations caritatives qui ont besoin de volontaires ? Chacun souhaite plus de sens dans ce qu’il fait et sentir cette étincelle qui fait qu’on ne compte pas ses heures de travail. 53 % des salariés veulent se sentir utiles au travail selon une étude menée par Audencia et Jobs That Make Sens. Alors comment raviver cette flamme ? Voici quelques solutions :
- Avoir recours à un management de proximité et plus humain pour faire comprendre aux salariés à quel point ils sont utiles. C’est en effet aux managers de donner de l’importance aux salariés. Cela passe par des mots d’empathie comme savoir dire “merci” ou “bravo”, de la reconnaissance, de l’écoute ou encore mettre en valeur leurs qualités.
- Contribuer aux enjeux de la transition écologique. C’est ce que souhaitent 57 % des salariés selon une étude menée par Audencia et Jobs That Make Sens. “Beaucoup de salariés disent vouloir avoir un impact positif à la fois sur la planète et sur la société, à travers leur travail. En conséquence, une entreprise n'offrant pas cette dimension à ses salariés a du souci à se faire, elle sera moins attractive pour les candidats », analyse André Sobczak, enseignant-chercheur à l'école et titulaire de la chaire, dans Les Echos.
- Rétablir la confiance perdue. À cause de tensions dans les relations, la confiance se perd entre les collaborateurs et l’employeur. Pour retrouver cette confiance perdue, cela passe par exemple par la création d’un environnement de travail épanouissant et la mise en place de moments de détente et conviviaux au sein même de l’entreprise.
- Reconnaître ses erreurs est la première brique pour rétablir la communication avec un salarié qui se sent lésé ou sous-estimé. "Un manager qui n'admet pas ses erreurs le paiera cher sur les plans individuels et collectifs. Le mea-culpa est une façon de rappeler que le capitaine est toujours à bord, même s'il a commis une erreur”, explique Eric Goulard, un coach expert en communication non-verbale dans le magazine Capital. À condition, de rester humble, d’être dans une posture d’écoute et de recueillir leurs ressentis.
- Communiquer plus souvent avec les salariés à distance. Pour Elizabeth DeGroot, directrice des ressources humaines et des finances chez Eden : "se connecter fréquemment via des entretiens individuels hebdomadaires qui discutent à la fois du développement professionnel et personnel peut aider les employés à se sentir plus engagés et motivés dans leur cheminement de carrière et leurs emplois actuels".
Vous l’aurez compris, il n’est jamais trop tard pour prendre les choses en main lorsqu’il s’agit de ré-engager les salariés ! « Prenez soin de vos employés, ils prendront soin de votre entreprise. », dixit Richard Branson, célèbre patron de Virgin.