L’année 2019 s’annonce chargée côté RH ! Dans un contexte social tendu depuis la fin 2018 et avec les différentes réformes sur le travail issues - entre autres - des ordonnances Macron (réforme du Code du travail de septembre 2017) et de la « loi Avenir professionnel », plusieurs chantiers RH clés doivent être menés de front pour dynamiser l’entreprise, la rendre plus contributive et responsable, puis, donner plus de sens aux trajectoires professionnelles. Un vaste programme aux promesses ambitieuses mais nécessaires pour - tenter - de réconcilier les salariés avec leurs entreprises : 6% des salariés¹ sont engagés en 2018. Récapitulatif des grands volets en termes de ressources humaines à traiter pour se mettre à jour et anticiper au mieux le planning social 2019.
1. Loi « Avenir professionnel » : de l’emploi à l’employabilité
Le but de cette réforme est de rendre le salarié le plus autonome possible sur son avenir professionnel en facilitant l’accès à la formation. Les volets clés qui concernent directement le métier des RH :
CPF : le compte personnel formation - remplace le DIF - passe d’un crédit en heures de formation (24h par an) à un fonctionnement en euros (500 € par an). Le montage financier de la formation qui exigeait un accompagnement est remplacé par un accès à un compte en ligne. Une application mobile sortira au deuxième semestre 2019.
CIF (Congé individuel de formation) : il devient le « CPF de transition professionnelle » et permet aux salariés en poste, démissionnaires et aux indépendants qui ont un projet de reconversion de suivre des formations destinées à évoluer vers d’autres métiers.
Plan de formation : il se transforme en « plan de développement des compétences » avec les actions dont le but est « d’atteindre un objectif professionnel ». Petite révolution digitale : il introduit plus facilement les nouveaux formats d’apprentissage tels que le e-learning, MOOC, SPOC², conférences...
L’alternance est assouplie, élargie et plus internationale :
- Contrat d’apprentissage : il est maintenant étendu jusqu’à 29 ans avec, pour les apprentis, une rémunération supérieure et une aide au permis de conduire.
- Contrat de professionnalisation : ils sont allongés jusqu’à 36 mois avec des périodes de mobilité à l’étranges possibles.
Entretien annuel : le sacro-saint entretien professionnel rendu obligatoire avec la réforme de 2014 est plus flexible et en phase avec les transitions professionnelles inhérentes au contexte actuel :
- La périodicité de l’entretien : par accord d’entreprise ou de branche, elle peut être modifiée. Impact ? Il peut donc ne pas avoir lieu tous les 2 ans (contrairement à 2014) et peut se tenir à l’initiative du salarié, avant sa reprise de poste s’il s’est absenté (retour de congé ou mi-temps).
- Le contenu : l’entreprise doit absolument communiquer sur l’activation du compte personnel de formation (CPF). De plus, les employeurs doivent également présenter le conseil en évolution professionnelle (CEP), un accompagnement gratuit accessible à tous pour faire le point sur sa situation professionnelle.
2. Renforcement du dialogue social : la lutte finale ?
À horizon janvier 2020, le CSE, Comité Social et Économique, se substituera aux délégués du personnel dans les entreprises d’au moins 11 salariés et aux trois instances, délégués du personnel, comité d’entreprise et CHSCT (comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail) dans les entreprises d’au moins 50 salariés.
L’objectif pour Muriel Pénicaud ? Favoriser un dialogue social simplifié. La ministre du travail souhaite « passer d’un droit social administré à plus d’espaces de dialogue »³. Si ce n’est pas le cas : il faudra organiser de nouvelles élections et mettre en place cette nouvelle instance, avec tout ce qu’elle implique : nouveaux accords d’entreprise, nouvelles élections, nouveau règlement intérieur…. Vous êtes perdu ? La méthodologie est à votre disposition.
3. Favoriser l’épargne salariale : mettre du collectif dans l’engagement
Levier RH et véritable facteur d’engagement, l’épargne salariale est un ensemble de dispositifs visant à associer les salariés aux résultats de leur entreprise. Elle est encore peu exploitée.
Concrètement, on parle de quoi ? Plan d’épargne d’entreprise (PEE), de groupe (PEG), plan d’épargne interentreprises (PEI), plan d’épargne pour la retraite collectif (PERCO) et plan d’épargne pour la retraite collectif interentreprises (PERCO-I).
Afin d’activer ce levier de motivation collective, notamment dans les PME, le forfait social, c’est-à-dire la contribution patronale de 20%, est supprimé :
- sur l’intéressement, pour les entreprises de moins de 250 salariés.
- sur la participation et l’abondement employeur pour les entreprises de moins de 50 salariés.
À noter : au-delà de ces seuils, le projet de loi PACTE, en révision par le Sénat, prendra le relais législatif. Plus globalement, l’objectif de ce texte législatif est d’assouplir ou supprimer un certain nombre de formalités incombant aux entreprises, et notamment aux PME.
4. L’égalité salariale en ligne de mire
Cinq indicateurs devraient permettre de mesurer objectivement les écarts salariaux. Muriel Pénicaud avait annoncé comme date butoire 2022 avec, non pas des objectifs de moyens, mais une obligation de résultats en matière d'égalité salariale entre femmes et hommes. L'entreprise, selon sa taille, aura entre trois mois et deux ans pour les appliquer. Le chantier démarre dès janvier 2019 puisque le ministère réunit l'ensemble des organisations syndicales et patronales pour élaborer un plan d’actions concret et son suivi.
5. Gestion de la santé au travail : changement de paradigme
Suite à la remise du rapport « Santé au travail : vers un système simplifié pour une prévention renforcée » réalisé par la Députée de La République en marche (LREM) Charlotte Lecocq en septembre 2018, le thème de la prévention de la santé est au coeur des réflexions sur la qualité de vie au travail. Le but ? Poser les bases d’un nouveau système de prévention des risques professionnels. Un projet de loi serait annoncé à l’été 2019. Autre sujet lié annexe : les arrêts de travail, préoccupation quotidienne des ressources humaines. Les solutions évoquées et en questionnement ? Une révision du versement des indemnités journalières aux salariés arrêtés : elles pourraient être identiques pour tous, quel que soit le salaire.
6. Impôt à la source : attention, corde sensible
Fin janvier, les salariés verront sur leur fiche de paie leur rémunération mensuelle amputée de l’impôt sur le revenu. Par anticipation, certaines entreprises ont proposé une simulation du prélèvement sur les fiches de paie de fin 2018. Sur 2019, dans un contexte social tendu, la gestion de ce changement est un enjeu RH majeur : il faudra faire preuve de pédagogie afin d’expliquer, en détails, la réforme et la manière dont cela se traduit sur les bulletins de paie. L’écoute et la communication seront incontournables pour rassurer car la rémunération est un sujet sensible : liée à la reconnaissance, elle peut-être un fort vecteur de désengagement.
7. Les premières mesures d’urgence économiques et sociales : 3 actions phares
Suite au mouvement des Gilets jaunes, des actions d’urgence ont été promulguées le 24 décembre 2018 pour une application dès le 1er janvier 2019. Les 3 impacts clés pour les RH :
- La prime défiscalisée et exonérée de charges sociales pour les salariés, dont la rémunération ne dépasse pas 3 600 €/mois doit être versée avant le 31 mars 2019.
- L’entrée en vigueur de l’exonération de cotisations salariales sur les heures supplémentaires et complémentaires.
- Le bonus individuel de la prime d'activité est augmenté de 90 € au niveau du Smic pour soutenir le pouvoir d'achat. Couplé à l’augmentation de 1,5%, le gain s’élève à 100 €.
Cette checklist RH n’est pas exhaustive ! D’autres mesures fondamentales ont été initiées telles la fin du CICE et baisse de charges patronales, réforme de la retraite complémentaire, fusion Agirc-Arrco, création de France Compétences, le regroupement des OPCA en une dizaine d’OPCO et la convergence FONGECIF et OPACIF en CPIR (Commissions Paritaires Inter Régionales). En savoir plus
Laure Girardot
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Sources
¹Enquête Gallup 2018
² MOOC : Massive Online Open Course, c’est une formation en ligne accessible librement / SPOC : Small Private Online Course, c’est un dispositif pédagogique complet, avec en plus des vidéos et quiz, la réalisation d’exercices pratiques et de travaux collaboratifs. Il est à destination d’un public ciblé.
³ Invitée à la Cérémonie de remise du Certificat Culture économique et sociale et table ronde « Formation des élus et dialogue social » à SciencesPo (17 janvier 2019)